Un contrat d’assurance-vie peut être requalifié en donation, justifiant la récupération de la créance d’aide sociale à l’encontre du bénéficiaire du contrat.
Une loi du 28 décembre 2015 a étendu la possibilité offerte aux organismes ayant versé certaines aides sociales de recourir contre la succession du bénéficiaire en étendant à ces recours les dispositions de l’article 757 B du CGI et en permettant notamment aux départements d’exercer leurs droits sur le montant des primes d’assurance-vie versées par le bénéficiaire après l’âge de 70 ans (CASF, art. L. 132-8, 4°).
Une personne ayant bénéficié de prestations au titre de l’aide à l’hébergement des personnes dépendantes avait souscrit des assurances-vie en versant des primes pour un montant total de 29 646 € alors que le surplus de son patrimoine représentait une valeur de 12 059 €. Bien que le bénéficiaire de l’aide soit décédé le 25 juillet 2015, soit avant la modification législative étendant le recours du département aux primes versées, ce dernier prétendait récupérer une partie de sa créance sur leur montant. Le tribunal avait validé le recours du département et la cour d’appel le confirme.
Certes, elle relève que les dispositions de la loi du 28 décembre 2015 ne pouvaient s’appliquer, le décès étant antérieur, mais elle se fonde sur la possibilité qu’avait le département de recourir sur les sommes ayant fait l’objet d’une libéralité, ce qui l’amène à qualifier l’assurance-vie de libéralité indirecte. A l’héritière qui contestait la décision en invoquant l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles antérieur à la modification législative, la cour répond qu’il résulte de l’article 894 du code civil qu’il y a donation s’il y a intention libérale, déssaisissement et acceptation par le bénéficiaire. La première condition était remplie car la bénéficiaire désignée était la nièce seule légataire. La volonté du souscripteur de se dépouiller était établie ainsi que l’acceptation par la bénéficiaire du contrat.
Il apparaît donc qu’en dehors des dispositions de l’article L. 132-8, 4° du CASF et pour des souscripteurs âgés de moins de 70 ans, la preuve de l’existence d’une libéralité indirecte constitue toujours un risque pour les bénéficiaires.
Michel Hérail, Docteur en droit, directeur honoraire Cridon-Ouest
Etudes concernées
- Règlements successoraux
© Editions Francis Lefebvre – Editions législatives 2022